??‍?‍?? “Via Gebennesis” – un beau témoignage

24 octobre 2021 – Béatrice est une sympathique jeune femme, adhérente depuis peu de temps à l’ARA-Rhône. Elle a témoigné à la récente Réunion des “Retours de Pèlerins”, salle Sala à Lyon 2.

Enthousiasmée par son expérience sur la Via Gebennesis (Genève-Le Puy), Béatrice nous livre un récit d’une grande pureté sur une rencontre improbable, mais pleine de vérité et de sincérité.

Laissons-lui la parole, admirons ses photos …

pere-joan-sticker-1

VIA GEBENNESIS – 26 juillet au 9 août 2021

En cette année jubilaire, le Chemin me rappelle. En effet, je suis déjà arrivée à Santiago en 7 années de délicieux compagnonnages de deux amies (2010-2017). Cette fois-ci, j’ose partir seule sur la Via Gebennesis réalisable en 15 jours. Je désire cheminer sur la totalité d’une voie.

Rassurée par un pèlerin bénévole de l’Association Rhône-Alpes des Amis de Saint-Jacques, rencontré à l’exposition sur le Chemin à la crypte de Fourvière, je ne crains plus de me perdre et acte le départ à Genève. Il a fait cette voie en mai de cette année et me dit : « Pour se perdre, il faut vraiment le vouloir ! ».

Le 26 juillet, je prends le 1er funiculaire de Saint Just et grimpe dans le 1er TER qui me conduit à Genève. La basilique Notre-Dame est fermée. Un vent de panique me gagne pour me lancer, et voilà une dame âgée au sourire irradiant qui m’indique une piste ! Mon 1er ange du Chemin. C’est la bonne piste et je m’approprie enfin la carte du Guide Jaune. La confiance en moi et en la vie m’envahie.

photo B. Maudet - Vers Chanaz, Fritz de dos

Complicité

Levée à 4h00, j’ai faim à 400 m de la frontière franco-suisse. Le banc du pèlerin m’attend. Je m’y installe et vois arriver un monsieur qui ouvre la boîte aux lettres de Charrot pour tamponner sa credencial. J’ose la conversation mais elle est très vite limitée : Fritz est allemand et nous balbutions quelques phrases en anglais. Je lui propose de partager mon pique-nique mais il préfère continuer son chemin.

Restaurée, une nouvelle seconde d’inquiétude me prend. Le gîte communal où j’ai réservé un lit est en libre accès, que vais-je trouver ? Alors je presse le pas pour arriver tôt et voilà que je rattrape Fritz en conversation avec 2 jeunes allemands qui bivouaquent. Je m’arrête pour quelques mots en anglais et au moment de partir Fritz m’invite à l’attendre. Très vite il me demande s’il peut s’arrêter pour la nuit dans le même gîte. Bien sûr ! Nous sommes d’ailleurs les seuls pèlerins occupants cette petite maison à Charly ! Nous voilà à partager ce que nous trouvons à manger dans la cuisine et nos petites victuailles.

Nous nous élançons le lendemain et il me demande de nouveau s’il peut s’arrêter au même gîte privé aux Côtes. En dehors de 6 ouvriers, nous sommes de nouveau les seuls pèlerins.

Photos B. Maudet - Avant La Côte-Saint-André
Photo B. Maudet - Vers Le Buisson

Smartphone

Le 3ème jour, grâce au traducteur sur nos smartphones, Fritz me dit « Puisque nous avons le même rythme et le même but, pourrions-nous marcher ensemble jusqu’au Puy ? » J’accepte joyeusement ! La barrière de la langue : il ne parle pas français et moi l’allemand, fait que nous marchons silencieusement, lui devant ou moi. A la fois seuls et sous la protection de l’autre, comme me dit Fritz « Nous sommes gardiens l’un de l’autre ». Il est mon 2ème ange du Chemin.

Par prudence, de Lyon, j’avais réservé mes couchages de la 1ère semaine. Un soir je me mets en quête des hébergements de la semaine suivante. Et cela n’est parfois pas facile de trouver.

Les formidables Accueils  Jacquaires© sur cette voie ont parfois dû fermer. Mais ils ne nous lâchent pas ! Ainsi une dame âgée m’oriente vers une jeune personne à Pélussin, à 7 km HC (hors du chemin), venue nous prendre à Bessey et qui nous a remis sur le chemin le lendemain.

photo B. Maudet - sculpture Stephane Morit
photo B. Maudet - Vers Clavas

Ainsi Fritz, ce soir-là quand il m’a vue peiner à trouver nos hébergements, me dit : « Pourquoi fais-tu tout cela pour moi ?» Je ne peux que lui dire que c’est l’esprit du Chemin.

Il continue sa remarque : « Tu sais, si tu n’avais pas été là, j’aurais fini par prendre un train pour rejoindre Le Puy ». A mon tour d’être un ange du Chemin !

Fritz reste étonné de tant de gentillesse en France. Ses lunettes réparées gratuitement à Bourg-Argental, et ses semelles orthopédiques au Puy par une jeune podologue qui nous reçoit avec beaucoup de soins.

Cette gratuité le bouleverse.

Si nous ne nous étions pas rencontrés, nous aurions marché des journées entières dans la nature sans rencontrer qui que ce soit.

Fritz, 63 ans, menuisier à la retraite depuis 1 an, est parti de chez lui près de Stuttgart à pied et est arrivé depuis à Santiago. ll a parcouru 2300 km. Nos échanges à l’écrit sont encore plus difficiles mais cette rencontre lumineuse et pleine de sagesse m’habite encore.

Vraiment, sur le Chemin, il nous est donné selon nos besoins dans un accueil inconditionnel de ce qu’il nous offre !

Béatrice MAUDET – Fourvière, le 15/10/2021

Fermer le menu